Théorème : PQR alignés. Le pôle de PQR est le point de Lemoine de ABC. |
Quelques explications sur ce que nous allons prouver ici. Et tout d'abord sur le point de Lemoine d'un triangle.
On appelle symédiane la symétrique d'une médiane par rapport à la bissectrice.
Les symédianes sont concourantes, le point de concours s'appelle le point de Lemoine du triangle.
Ceci est une conséquence directe du théorème de Ceva, dans sa version trigonométrique,
et du fait que les médianes sont concourantes.
L'alignement des points P, Q et R est un cas particulier du théorème de Pascal sur les coniques :
Soient 6 points sur une conique ABCDEF.
Les points d'intersection de AD et BF, de AE et CF, et de BE et CD sont alignés.
Si on fait tendre
D→A, E→B et F→C
et si la conique est un cercle on obtient la propriété voulue.
Nous allons toutefois ici démontrer directement l'alignement de P,Q,R sans utiliser le théorème de Pascal, ce qui donnera en prime le pôle de la droite PQR.
Soient U, V, W les intersections des tangentes en A, B et C.
Par construction U est le pôle de BC donc U est conjugué de tous les points de BC, en particulier de P.
Tous les points de la tangente en A sont conjugués de A, donc P est conjugué de A.
La polaire de P est donc la droite UA.
De même la polaire de Q est la droite VB et la polaire de R la droite WC.
Ces trois droites se coupent en L qui est le point de Gergonne du triangle UVW.
En effet le cercle circonscrit au triangle ABC est le cercle inscrit de UVW et ABC en sont les points de contact.
Rappel : La démonstration que UA, VB et WC sont concourantes est élémentaire avec le théorème de Ceva.
UB = UC, VC = VA et WA = WB, donc AV/AW × CV/CU × BU/BW = -1.
Le point L est donc conjugué de P, Q et R. Donc P, Q et R sont sur la polaire de L et sont donc alignés.
Il s'agit maintenant de montrer que les droites AU, BV et CW sont les symédianes de ABC.
Ceci démontrera d'une part la propriété annoncée (le pôle de PQR est le point de Lemoine de ABC)
et d'autre part prouvera que dans tout triangle (UVW), le point de Gergonne est le point de Lemoine
du triangle inscrit (ABC), formé par les points de contact du cercle inscrit.
Soit O le centre du cercle circonsrit à ABC, et M l'intersection de UO avec BC. M est le milieu de BC.
UA recoupe le cercle en E et BC en D. BC étant la polaire de U, la division UEDA est harmonique.
Traçons les parallèles à BC en U, E, D(!) et A.
Elles forment sur n'importe quelle sécante à ces droites une division harmonique.
La parallèle en A coupe UO en X et recoupe le cercle en A'.
La parallèle en E coupe UO en Y et recoupe le cercle en E'.
UYMX est donc une division harmonique.
UO est axe de symétrie donc A'E'U alignés.
M est donc l'intersection de AE' et A'E. (construction classique du conjugué M de U).
Les angles BAE et E'A'C sont égaux par symétrie, et les angles inscrits E'AC et E'A'C sont égaux.
Donc les angles BAU et MAC sont égaux et comme AM est la médiane, AU est la symédiane. CQFD.
Nota :
Le cercle est le cercle inscrit à UVW seulement si ABC est un triangle acutangle (tous ses angles aigus)
Si ABC a un angle obtus, disons A, le cercle est un cercle exinscrit dans l'angle U de UVW.
Toutes les propriétés ci-dessus sont valables, mais le point L n'est pas dans ce cas le point de Gergonne de UVW.
C'est toujours le point de Lemoine de ABC et le pôle de PQR.
Ceci ne porte pas à conséquence pour prouver que le point de Gergonne est le point de Lemoine du triangle inscrit,
car le triangle inscrit est toujours acutangle.
La démonstration que PQR sont alignés est comme déjà signalé une conséquence directe du théorème de Pascal.
Ce qui a l'avantage de s'appliquer à une conique quelconque.
"la" conique circonscrite à ABC n'ayant pas de sens (il y en a une infinité), on modifiera l'énoncé :
Soit une conique et trois points ABC sur cette conique...
Les droites AU, BV, CW sont alors concourantes en vertu du dual du théorème de Pascal : le théorème de Brianchon.
Le point L est toujours le pôle de PQR.
Par contre il n'a plus aucun rapport avec le point de Gergonne, les symédianes et le point de Lemoine...
Soient CT3 et CT'3 les bissectrices intérieures et extérieures de l'angle C.
T3 et T'3 divisent AB dans le rapport CA/CB.
La division [ABT3T'3] est harmonique.
Le cercle de diamètre T3T'3 est appelé le cercle d'Apollonius du sommet C,
de centre U3.
Vu autrement, le cercle circonscrit coupe le diamètre T3T'3 du cercle d'Apollonius en A et B
pour former une division harmonique.
Donc le cercle d'Apollonius est orthogonal au cercle circonscrit et CU3 est tangent au cercle circonscrit.
Le point U3 est donc en fait le point R, intersection de AB avec la tangente en C.
les points P, Q, R sont les centres des cercles d'Apollonius du triangle ABC
La droite CC', axe radical des deux cercles, est donc aussi la polaire de R par rapport au cercle circonscrit.
Démontrons que cette polaire est la symédiane.
Soit M3 le milieu de AB. La médiatrice MM3 coupe le cercle circonscrit en C3
milieu de l'arc AB opposé à C.
Donc CC3 est la bissectrice de l'angle C. CM3 est la médiane.
Traçons le cercle de diamètre RM. Il passe par C et C' (CM_|_CR) et M3 (MM3_|_M3A)
Les angles inscrits dans ce cercle donnent : C'MM3 = C'CM3
D'autre part dans le cercle circonscrit l'angle au centre C'MC3 est le double
de l'angle inscrit C'CC3
Donc C'CM3 = 2 * C'CC3 ou encore CC3 est la bissectrice de C'CM3,
c'est à dire la droite CC' est la symétrique de la médiane CM3 par rapport à la
bissectrice de l'angle C : CC3.
Donc :
La polaire de R est la symédiane
Finalement les symédianes étant concourantes au point de Lemoine L, leur pôles (les points PQR) sont alignés sur la polaire de L. CQFD.